C'est pas juste du chocolat
Épisode 1 : La maladie qui décime les cacaoyères
Fin 2024, le prix du cacao passe à 10 000 $ la tonne. C'est deux fois plus qu'en décembre 2023. En cause : le changement climatique, l'irrégularité des pluies, et le "swollen shoot", une maladie qui décime les cacaoyers dans plusieurs pays africains. En Côte d'Ivoire, on estime qu'une plantation sur dix est touchée. Le pays fournit 44 % du cacao échangé au niveau mondial.
Aucun traitement n'existe, si ce n'est lutter contre les cochenilles farineuses, ces petits insectes blancs qui transmettent la maladie aux arbres. Sauf que les cochenilles sont très peu sensibles aux insecticides et surtout, elles sont partout. Face à ce fléau, et pour éviter aux producteurs d'abattre les cacaoyers, il existe pourtant une solution : l'agroforesterie.
Il y a une quarantaine d'années, la production de cacao est passée en monoculture plein soleil. Les cacaoyères d'aujourd'hui ressemblent donc à d'immenses champs uniformes, avec des arbres collés les uns aux autres. Les branches forment des ponts utilisés par les cochenilles pour se déplacer...et transmettre la maladie. Et s'il suffisait de mettre des barrières végétales entre les cacaoyers ?
Avec :
- Régis Babin, entomologiste au Cirad
- Assata Doumbia, productrice de cacao en Côte d'Ivoire et présidente du conseil d'administration de la coopérative ECAM
Épisode 2 : Plus de bananes, moins de pesticides
La banane, c'est plus de 24 millions de tonnes échangées au niveau mondial chaque année. En France, c'est le premier fruit consommé, devant la pomme. Et avant d'arriver jusqu'à nous, la banane voyage : toutes les zones de production se trouvent sous les tropiques, à savoir l'Amérique latine, l'Afrique et les Antilles.
La forte pluviométrie des zones tropicales oblige souvent les producteurs à traiter intensément, afin de protéger leurs bananeraies des éventuels champignons. Cette dépendance n'est cependant pas une fatalité : des traitements alternatifs existent et ont déjà fait leurs preuves aux Antilles.
En Colombie, l'entreprise Lidl a initié un projet de ferme pilote en agroécologie, basé sur la surveillance des parcelles et l'utilisation de produits homologués en bio. Après un an, les résultats sont plus que positifs : le rendement est similaire, les traitements phytosanitaires ont baissé de moitié, et les bananeraies sont en bonne santé. Un projet qui a réussi un autre tour de force : celui de mettre autour de la table l'ensemble des acteurs de la chaîne, du producteur colombien Tecbaco à l'importateur français AZ France, en passant la grande distribution ainsi que la recherche.
Avec :
- Annaig Blouin, ingénieure agronome au Cirad
- Inès Dupouy, cheffe de projet RSE à Lidl et chargée de la responsabilisation des filières fruits et légumes
Épisode 3 : Riziculture tropicale en Camargue
La vision classique de la culture du riz implique souvent des rizières inondées où l'eau miroite. Le sol est dur et très compacté, afin d'éviter toute infiltration et donc perte d'eau. Dans ces systèmes, le riz ne développe pas ses racines, le sol s'appauvrit et se tasse rapidement.
En Camargue, quelques agriculteurs ont pris un autre chemin : celui de l'agriculture de conservation. Technique conçue et développée sous les tropiques, l'agriculture de conservation repose sur trois principes : le "no-till", c'est-à-dire aucun travail du sol ; des couverts végétaux en permanence pour éviter de laisser le sol à nu ; et une biodiversité cultivée la plus importante possible.
Moins de machines, moins de carburant, moins d'intrants chimiques...et autant de rendement. Pour les agriculteurs, la prise de risque se situe surtout lors de la période de transition entre le système conventionnel et le système en agriculture de conservation.
Avec :
- Stéphane Boulakia, agronome au Cirad
- Xavier Jourdan, agriculteur en Camargue
Épisode 4 : Le meilleur poivre du monde ?
Il existe à Madagascar un poivre sauvage d'une qualité extraordinaire : le voatsiperifery. Cette liane grimpante pousse dans les forêts malgaches et fructifie à la cime des arbres.
Pour le récolter, les cueilleurs sont souvent obligés de couper les lianes, voire de couper l'arbre tuteur sur lequel elles poussent. Si les récoltes restent occasionnelles, ce type de pratiques n'engendre pas de destruction durable de l'habitat du tsiperifery. Sauf que depuis les années 2010, la demande pour ce poivre exceptionnel n'a cessé d'augmenter. Les risques de surexploitation, et donc de disparition du poivre sauvage, sont donc élevés.
Une solution : la domestication. La recherche malgache et française, ainsi que plusieurs entreprises privées, ont lancé des travaux pour comprendre les ressorts écologiques de la liane. L'objectif à terme : mettre en place des méthodes de cultures intéressantes pour les communautés locales, créer des emplois et structurer une filière économique viable, tout en protégeant la biodiversité.
Avec :
- Jérôme Queste, chercheur au Cirad
- Virginie Kockelmann, responsable de la partie recherche et développement à Floribis, une société agroalimentaire basée à Madagascar
Épisode 5 : Manioc, de la racine à la farine
Peu connu en France, le manioc rivalise pourtant avec la pomme de terre dans de nombreux pays tropicaux. En République Démocratique du Congo, c'est un véritable pilier du régime alimentaire : la consommation y est estimée à environ 250 kilos par an et par personne. Par comparaison, la consommation moyenne de pommes de terre en France est d'environ 50 kilos par an et par personne.
Cru, bouilli, transformé en farine ou en semoule : le manioc se décline selon les envies. En RDC, l'un des plats principaux est le foufou : une pâte faite à partir de farine fermentée de manioc, et qui se mange avec des plats en sauce.
La transformation de cette racine en farine est souvent artisanale, mais depuis plusieurs années, la filière s'industrialise. Une étape particulière semble cependant poser problème : le séchage. En 2019, un programme se met en place entre des entreprises congolaises et une équipe internationale de chercheurs pour améliorer ces "séchoirs-flash" et réduire la dépendance énergétique des équipements.
Avec :
- Arnaud Chapuis, chercheur au Cirad et spécialisé en génie des procédés
- Mamadou Ndiaye Kunga, fondateur d’Agrimac, une entreprise congolaise qui fabrique des équipements pour l’agroalimentaire (République Démocratique du Congo)
Épisode 6 : Je te paye le café ?
En France, le café est la première boisson chaude consommée. En 2024, on estime qu'un français boit en moyenne deux à trois tasses par jour. Derrière ce produit ultra populaire, il y a en réalité deux filières : le café industriel, largement majoritaire, et le café dit "de spécialité".
Les cafés de spécialité sont plus chers, mais se veulent meilleurs en goût que les cafés industriels. Un peu comme le vin, ils mettent en avant des saveurs et des terroirs originaux. Les méthodes de production sont aussi scrutées, et de gros efforts sont fournis en matière de durabilité.
Goût, traçabilité, durabilité... Découvrez les grandes différences entre café industriel et café de spécialité.
Avec :
- Benoît Daviron, spécialiste en économie politique internationale et chercheur associé au sein de l'unité de recherche MoISA à Montpellier
- Arnaud Causse, responsable transition agroécologique chez Belco, une entreprise sourceur de cafés verts de spécialité