Plantes, animaux, humains : nos santés en commun
Épisode 1 : Des chauves-souris et des hommes
75 % de nos maladies infectieuses sont d’origine animale. Les grippes humaines, par exemple, ont toutes d’abord été aviaires ou porcines. Ces maladies animales qui contaminent les êtres humains, on les appelle les « zoonoses ». Comment fonctionnent ces transmissions d’espèces à espèces ? Peut-on les éviter ? Et en cas d’émergence, comment ralentir la propagation, voire tuer l’épidémie dans l’œuf ?
Au Cambodge, le Cirad et l’Institut Pasteur du Cambodge sont partis à la recherche du virus Nipah chez des chauves-souris de l’espèce Pteropus liley, qu’on appelle « flying fox », ou « renard volant ». En faisant des prélèvements de sang, d’urine ou de salive, les scientifiques espèrent mieux comprendre la circulation du virus dans la faune sauvage. L’équipe s’est également penchée sur la création de réseaux de surveillance communautaire, afin de détecter le plus rapidement possible les émergences au sein de la population humaine.
Le virus Nipah est souvent très mortel pour l’être humain, avec un taux de létalité estimé entre 40 et 80 % en fonction des souches virales. Des émergences sont régulièrement signalées en Asie du Sud-Est. Début 2023, onze cas ont été signalés au Bangladesh, dont huit morts.
Avec :
- Julien Cappelle, écologue de la santé au Cirad
- Veasna Duong, chef de l’unité de virologie de l’Institut Pasteur du Cambodge
Épisode 2 : Vacciner contre la grippe aviaire
La grippe aviaire, qui était avant cantonnée à certains territoires, s’est récemment étendue à la faune sauvage du monde entier. La maladie contamine aussi les élevages. En France, sur l’hiver 2020-2021, trois millions de volailles ont été abattues. Hiver 2021-2022 : plus de 1 300 élevages étaient infectés, et 22 millions de volailles ont été abattues en une saison.
À l’automne 2023, et devant l’urgence de la situation, la France a lancé une campagne de vaccination sur la filière canard. Pour s’orienter dans cette situation inédite, les acteurs de la filière ont eu recours à EVACS, un outil numérique développé par le Cirad, qui permet de simuler différentes stratégies vaccinales et d’évaluer leur impact.
Avec :
- Claire Hautefeuille, vétérinaire et épidémiologiste au Cirad
- Stéphanie Castagnos, responsable marketing et technique chez CEVA Santé Animale
Épisode 3 : Un sol vivant
Un sol dégradé, par la déforestation ou par des pratiques agricoles inadaptées, est un sol malade qui n’est plus capable d’assurer certaines fonctions, comme le stockage du carbone ou la fourniture de nutriments pour les cultures.
Pour évaluer la santé d’un sol, une méthode consiste à s’intéresser à sa macrofaune, c’est-à-dire les organismes présents dans le sol et visibles à l’œil nu : les fourmis, les termites ou encore les vers de terre. L’existence de cette faune est en général liée à la présence ou non de couverture végétale, qui offre nourriture et abri.
Dans le Nord du Brésil, en pleine Amazonie, des paysans et des paysannes s’attachent à restaurer des terres dégradées par des années de déforestation et de monocultures. Ils utilisent pour cela des pratiques agroforestières, et cultivent des parcelles qui vont jusqu’à plusieurs centaines d’arbres à l’hectare. Grâce à ce nouveau couvert végétal, la vie du sol revient.
Avec :
- Raphaël Marichal, écologue au Cirad
- Lívia Navegantes, professeure d'agronomie à l'Université fédérale du Pará (Brésil)
Épisode 4 : Moustiques localisés
La dengue ou le chikungunya sont des maladies virales dont la transmission se fait uniquement par des insectes, dont les moustiques du genre Aedes comme le moustique tigre. Ce type de transmission est dite « vectorielle », car elle passe par un vecteur, ici un insecte qui se nourrit de sang.
Pour faire face à ces maladies vectorielles, une des stratégies consiste à réduire les populations d’insectes vecteurs. À La Réunion, l’Agence régionale de santé s’est doté d’un logiciel qui cartographie en temps réel les densités de populations de moustiques tigres sur l’île. Grâce à cet outil, l’ARS peut prédire les zones les plus à risque de voir émerger des cas de dengue, et ainsi prévenir les épidémies.
Nommé ArboCarto, le logiciel mobilise à la fois des données entomologiques, météorologiques, et du traitement d’images satellites. Il a pu voir le jour grâce à la collaboration entre des experts en santé animale et en santé humaine.
Avec :
- Annelise Tran, chercheuse au Cirad, spécialiste en modélisation spatiale pour des applications en santé
- Manuel Rodicq, responsable du service de lutte anti-vectorielle à l'Agence régionale de santé La Réunion
Épisode 5 : Le prix de la santé des cultures
L’impact des insecticides chimiques sur la biodiversité et sur l’environnement est encore sous-estimé. Leur utilisation abusive entraîne le déclin de populations d’insectes utiles comme les pollinisateurs. Des résidus sont souvent retrouvés sur les légumes, et circulent dans l’environnement de manière incontrôlée.
En Côte d’Ivoire, le projet MARIGO vise à développer un maraîchage périurbain agroécologique, afin de limiter l’usage des intrants chimiques sur les cultures. Producteurs, consommateurs, sols, écosystèmes : la santé s’améliore pour tous et partout. Reste la question de la viabilité économique pour ces maraîchers, dont les produits cherchent une reconnaissance sur le marché face à une production conventionnelle aux prix concurrentiels.
Avec :
- Thibaud Martin, chercheur au Cirad, spécialiste de la protection agroécologique des cultures
- Euphrasie Angbo-Kouakou, enseignante chercheuse en économie appliquée à l’INP-HB de Yamoussoukro, en Côte d'Ivoire
Épisode 6 : Santé et solidarité
Dans la Caraïbe, le projet CaribGREEN tente de rassembler tous les acteurs qui s’intéressent de près ou de loin à la santé des agro-environnements. Qu’est-ce que des vétérinaires ont à apprendre des producteurs de bananes ? Et comment assurer un partage d’information continu entre les îles, malgré la barrière de la langue et les différentes cultures ?
CaribGREEN est un exemple de mise en pratique de l’approche One Health à l'échelle régionale. Au-delà de la science, cette approche est d’abord un outil qui sert à tisser des liens et éclaire les défis sanitaires sous un nouveau jour. Des outils de veille sanitaire ont par exemple été adaptés à la Caraïbe pour assurer une meilleure surveillance de la circulation des maladies, humaines, animales ou végétales.
Avec :
- Julie Mathelin, cheffe du projet CaribGREEN pour le Cirad, basée en Guadeloupe
- Karla Georges, directrice de l’école de médecine vétérinaire à la faculté des sciences médicales, qui fait partie de l’Université des Indes occidentales à Trinité-et-Tobago