Plantations forestières : l’union des espèces fait la force face au changement climatique

Science en action 1 février 2021
Productivité, stockage de carbone, adaptation au changement climatique. Les plantations forestières associant plusieurs espèces d’arbres peuvent être plus performantes que les plantations monospécifiques. À condition toutefois d’être bien gérées. Le projet MixForChange va explorer ce triple potentiel des forêts plantées mixtes et traduire les connaissances acquises en lignes directrices pour les gestionnaires forestiers. Ces avancées aiguilleront également les actions de reboisement qui sont de plus en plus nombreuses. MixForChange est coordonné par le Cirad et bénéficie du soutien financier de l'Union européenne et du Brésil via l'appel à projet Biodiversa. Démarrage prévu ce 1er février pour une durée de trois ans.
Plantation associant plusieurs espèces d’arbres de la Mata Atlântica dans l’État de São Paulo, au Brésil. © J. Guillemot, Cirad

Replanter des arbres c’est bien. Mais pas n’importe comment c’est mieux. Qu’elles soient commerciales ou utilisées dans le cadre de projets de restauration forestière, les plantations d’arbres sont en pleine expansion. Mais la grande majorité ne comporte qu’une seule espèce. Il est pourtant de plus en plus évident que lorsque le mélange d’espèces est bien choisi, les plantations mixtes sont moins sensibles à certains stress liés au changement climatique, tout en étant plus productives. Le projet MixForChange vise à identifier les mécanismes écologiques à l’origine des avantages des plantations mixtes pour fournir des bases scientifiques aux gestionnaires forestiers. Le second volet du projet va s’attacher à caractériser les perceptions, les attentes et les contraintes de ces mêmes gestionnaires pour leur proposer des itinéraires de production sylvicoles adaptés à chaque contexte.

Étudier la productivité et la résilience des plantations mixtes

Un premier volet s’attachera à déterminer quels mélanges d’espèces sont à la fois productifs et résistants aux perturbations dans les différents contextes étudiés. Le programme s’appuiera pour cela sur le réseau mondial TreeDivNet, un réseau mondial d’expérimentations in situ sur la biodiversité forestière. Les données de ce réseau vont être analysées pour comprendre comment la diversité des arbres, l’identité des espèces et la gestion (éclaircie et fertilisation) influencent le potentiel des plantations forestières mixtes à atténuer (séquestration du carbone) et à s’adapter au changement climatique (sécheresse, événement climatique extrême…).

Les équipes impliquées dans MixForChange* vont plus particulièrement mesurer la séquestration du carbone dans le sol et la biomasse des arbres de différents mélanges d’espèces et monocultures d’arbres du réseau TreeDivNet situés en zone tempérée, boréale et tropicale. « Nous allons aussi étudier les réactions de ces plantations forestières aux perturbations environnementales en cherchant à savoir comment le mélange d’espèces et les communautés microbiennes du sol associées modifient la résilience à la sécheresse et à certains insectes ravageurs,  » complète Joannès Guillemot, chercheur au Cirad et coordinateur de MixForChange.
« Au terme de nos investigations, nous serons en mesure d’identifier les types de mélange à la fois productifs, résilients et compatibles avec les attentes et contraintes des gestionnaires. De plus, la connaissance des mécanismes écologiques sous-jacents pourra permettre d’étendre les prescriptions au-delà des espèces étudiées dans MixForChange.  »

Identifier les obstacles socio-économiques

En parallèle, des enquêtes socio-économiques seront réalisées auprès des gestionnaires et des exploitants forestiers. Ce volet du projet devrait permettre de mieux cerner le degré de sensibilisation et les formes de résistance des parties prenantes vis-à-vis des plantations mixtes et de leurs possibles avantages tant économiques qu’écologiques. Ce travail aidera à pointer les obstacles à la mise en œuvre des plantations forestières en mélange en tenant compte des objectifs de gestion et de rendement, mais aussi du contexte culturel propre à chaque région.

Grâce au partenariat noué avec la FAO et les acteurs privés de la filière sylvicole, les avancées scientifiques issues de MixForChange seront rapidement transférées au-delà des cercles académiques. En identifiant les mélanges d’essences les plus à même de résister au changement climatique, le projet pourrait par exemple contribuer à aiguiller les politiques de reboisement internationales. À l’image du défi de Bonn qui s’est fixé pour mission de reboiser 350 millions d’hectares de terres dégradées et déboisées d’ici 2030.

* Le projet MixForChange réunit 12 instituts de recherche originaires de Belgique, d’Allemagne, de Suède, d’Autriche, du Brésil, de France, d’Italie et du Canada ainsi que la FAO et divers partenaires privés de la filière sylvicole.