Science en action 24 octobre 2024
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- La question de l'élevage à la COP27
L’élevage bovin sous les tropiques est-il «climaticide» ?
Les productions animales, et en particulier l’élevage bovin, font partie des secteurs les plus impliqués dans les émissions de gaz à effet de serre. A ce titre, l’ensemble de ce secteur d’activité est souvent présenté comme climaticide, c’est-à-dire participant aux dérèglements climatiques globaux.
« De telles généralités sont problématiques, car elles empêchent de poser les bons diagnostics, commente Vincent Blanfort, agro-écologue des pâturages au Cirad. En particulier dans les territoires du Sud, où les références scientifiques sont plus rares. »
Afin de mesurer précisément le rôle des différents systèmes et pratiques d’élevage, les scientifiques du Cirad développent des partenariats scientifiques dans tout le monde tropical et méditerranéen. A l’occasion de la COP27, leur message est porteur de solutions opérationnelles faces aux défis de l’adaptation et de l’atténuation du changement climatique.
Leurs résultats seront présentés lors de deux side events, portant sur des régions emblématiques : le Sahel et l’Amazonie brésilienne. Retrouvez-le programme ici
Bilans carbones neutres pour les systèmes d’élevage pastoral sahéliens ?
Contrairement aux idées reçues, des résultats de recherche montrent que les territoires d’élevage pastoral au Sahel peuvent présenter un bilan carbone neutre. Développés par des scientifiques du Cirad, ces travaux ont mené au lancement d’un grand projet financé par l’Union Européenne dans six pays sahéliens : le projet CaSSECS.
Les éleveurs, en conduisant leurs troupeaux de façon raisonnée dans les parcours naturels, accélèrent et régulent la croissance des végétaux. En réponse, ceux-ci absorbent une plus grande quantité de carbone atmosphérique. Au Sahel, comme la densité animale est faible au regard de l’étendue des brousses, ce mécanisme compense les émissions de méthane entérique des bovins. Un tel équilibre n’est possible que sous de bonnes pratiques de gestion des troupeaux et des parcours, en évitant notamment le surpâturage. Des conditions accessibles, selon les chercheurs, qui soulignent pour cela l’importance de la coopération internationale.
Jérémy Bourgoin, chercheur au Cirad et co-auteur en 2022 d’une publication sur les systèmes pastoraux dans la région du delta du fleuve Sénégal, souligne que « outre le fait d’être une activité adaptée au milieu et vertueuse sur le plan climatique, le pastoralisme est aussi un des piliers de la sécurité alimentaire de nombreuses populations rurales».
En Amazonie, élevage et retour de la forêt sont-ils compatibles ?
En Amazonie brésilienne, la plupart des éleveurs ont cessé de déforester dans la période 2008-2011, quand a été instauré le nouveau code forestier brésilien. La déforestation reste, depuis, concentrée sur des territoires spécifiques : les fronts pionniers. Qu’en est-il des autres territoires amazoniens, où les éleveurs ont stoppé toute déforestation depuis 2011 ?
Les scientifiques du Cirad travaillent dans ces zones pour montrer que les ressources renouvelables, telles que le rayonnement solaire et les précipitations, peuvent produire des denrées agricoles de façon durable. L’élevage, contre toute attente, en est un bon élève. Avec des pratiques simples comme le pâturage tournant, les graminées fourragères sont très performantes pour convertir ces ressources en fourrages digestibles et de qualité, limitant d’autant les émissions de méthane.
« Les systèmes racinaires des graminées sont si prolifiques dans ces régions qu’ils produisent de la matière organique en abondance, renchérit René Poccard-Chapuis, géographe au Cirad. Ils sont une source importante d’entrée de carbone et fixent en quelques années seulement au moins autant de carbone dans le sol que les forêts elles-mêmes. »
Toute cette dynamique permet le retour de la forêt dans les paysages. En améliorant la gestion des prairies, les éleveurs amorcent une déprise agricole : ils concentrent leurs efforts sur les portions d’exploitations les plus aptes à accueillir les cheptels (sols fertiles, topographie plane…). Les zones abandonnées voient la forêt reprendre ses droits, fixant du carbone en plus de réguler le cycle régional de l’eau.
L’intérêt de ces travaux, pour le Cirad et les institutions brésiliennes, est de montrer les chemins à suivre pour des élevages plus rentables et contribuant aux objectifs climatiques. Ces activités, financées par l’AFD à travers le projet TerrAmaz et l’Union Européenne via le projet Sustenta & Inova, s’inscrivent en complément des actions du ministère public brésilien contre la déforestation illégale.
Retrouvez lors de la COP27 nos side-events relatifs à l’élevage