L’origine de la canne à sucre dévoilée

Vient de sortir 15 octobre 2025
L’origine de la canne à sucre, culture majeure à l’échelle mondiale, était jusqu’ici mal connue en raison de la complexité de son génome polyploïde et interspécifique. Une étude récente, menée au Cirad en collaboration avec le Joint Genomic Institute (USA), révèle l’histoire évolutive de cette culture. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives pour le développement de variétés de canne à sucre plus résistantes aux stress (maladies, changement climatique). Les résultats de ces travaux sont publiés le 14 octobre 2025 dans la revue Cell.
Prospection de canne à sucre en Polynésie. © M. Vitrac
Prospection de canne à sucre en Polynésie. © M. Vitrac

Prospection de canne à sucre en Polynésie. © M. Vitrac

La canne à sucre représente 80 % de la production mondiale de sucre et est de plus en plus utilisée pour la production de bioéthanol. Malgré son importance économique, l'origine de la canne à sucre était jusqu’alors controversée. 

La canne à sucre moderne est, parmi les plantes cultivées, celle qui a le génome le plus complexe, car elle a un nombre de chromosomes très élevé qui proviennent de plusieurs espèces. Cette complexité a ralenti la compréhension de son origine, de sa diversité et de l’architecture de son génome.

Angélique D’Hont
Coordinatrice de l’étude, Cirad - UMR Agap

La domestication à partir de l’espèce sauvage S. robustum confirmée

En analysant la diversité génomique, basée sur les données de séquençage de 390 accessions représentatives, à l’aide de méthodes innovantes - basées notamment sur le contenu en séquences répétées/éléments transposables -, les chercheurs du Cirad ont retracé la domestication, la diversification et la sélection moderne de la canne à sucre. Leur étude confirme le scénario selon lequel Saccharum officinarum (la canne sucrée) a été domestiquée à partir de l’espèce sauvage S. robustum il y a environ 8 000 ans en Nouvelle-Guinée et dans les îles alentour. D’autre part, elle révèle que son génome est mosaïque impliquant différents sous-groupes de S. robustum.

Découverte d’un ancêtre sauvage qui a contribué à la plupart des variétés modernes

L’étude montre également la contribution d’un ancêtre sauvage inconnu, probablement originaire de Mélanésie orientale, qui a participé à la constitution de la plupart des variétés modernes. 

Deux foyers anciens de diversification, associés à l’activité humaine, ont ainsi été mis en évidence :

  • l’un en Asie continentale, suite à des transports effectués par les humains il y a 3 000 ans, via des hybridations avec plusieurs sous-groupes de l’espèce sauvage S. spontaneum,
  • l’autre dans les îles mélanésiennes et polynésiennes, où S. officinarum a été introduit lors des migrations mélanésiennes il y a 3 500 à 500 ans, via des hybridations avec un ancêtre jusqu’alors inconnu et avec et avec le genre Miscanthus.  
Scénario de domestication et de diversification de la canne à sucre. © Cirad

Scénario de domestication et de diversification de la canne à sucre. © Cirad

Une opportunité pour de futures variantes de canne à sucre

Ces résultats permettent, pour la première fois, de retracer avec précision l’origine des variétés modernes et ouvrent de nouvelles perspectives pour l’amélioration variétale. 

Les espèces sauvages sont de potentielles sources de diversité allélique pour s’adapter au changement climatique. Dans ce cadre, il serait important de retrouver le contributeur inconnu, s’il existe toujours, car il représente un réservoir de diversité génétique potentiellement exploitable.

Olivier Garsmeur
1er auteur de l’étude, Cirad - UMR AGAP

La découverte de cette diversité sauvage encore inexploitée offre donc une réserve précieuse d’allèles pouvant contribuer au développement de cannes à sucre plus résilientes et adaptées aux défis climatiques à venir.

Référence

Garsmeur et al., The genomic footprints of wild Saccharum species trace domestication, diversification, and modern breeding of sugarcane, Cell (2025), https://doi.org/10.1016/j.cell.2025.09.017