« 4 pour 1000 » : des recommandations inédites pour préserver le carbone des sols en Outre-mer et atténuer le changement climatique

Résultats & impact 1 mars 2023
Coordonnée par le Cirad en partenariat avec INRAE et l’IRD, l’étude « 4 pour 1000 » Outre-mer dresse un bilan inédit des stocks de carbone du sol des territoires ultramarins. Les auteurs formulent des recommandations opérationnelles et de recherche pour préserver ces stocks élevés et répondre aux grands enjeux de l’agriculture face au changement climatique au niveau national et territorial.
© R. Carayol
© R. Carayol

Le dispositif Soere-Pro à La Réunion a été mobilisé pour les travaux sur la transposabilité du Label bas carbone en outre-mer. © R. Carayol

L’Initiative internationale « 4 pour 1000 » vise à mettre en place des actions concrètes pour augmenter les quantités de carbone stocké dans les sols, notamment par des pratiques agricoles et forestières adaptées.

Si le potentiel des sols métropolitains a fait l’objet d’une évaluation en 2019, celui des territoires ultramarins est jusqu’ici méconnu. Dans le cadre de l’étude « 4 pour 1000 » Outre-mer, un consortium coordonné par le Cirad en partenariat avec INRAE et l’IRD, avec l’appui financier de l’ADEME et le soutien du ministère des Outre-mer dresse pour la première fois un état des lieux des connaissances pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Le résumé réalisé pour les décideurs souligne deux enseignements. En matière de stocks de carbone dans les sols, les territoires ultramarins jouent un rôle important malgré leur faible superficie (15 % de celle de l’hexagone) : ils équivalent à environ 20 % des stocks de carbone des sols de métropole. Cela s’explique essentiellement par la minéralogie originale de ces sols développés sur roches volcaniques, mais révèle également l’impact de leurs usages (forêt, prairie, canne à sucre…). Deuxième constat : les données sur le carbone du sol dans ces territoires sont incomplètes. Les sols de la Guadeloupe, de la Martinique, de Guyane et de La Réunion sont documentés de façon conséquente mais néanmoins parcellaire. En revanche, aucune information n’existe encore pour Mayotte, Saint-Barthélemy et Saint-Martin.

En outre, du fait de l’importance de la forêt guyanaise - équivalent à 46 % de la superficie forestière métropolitaine - le carbone stocké dans la biomasse aérienne de ce territoire a spécifiquement été abordé dans le cadre de cette étude. Il en ressort qu’il équivaut à 120 % du carbone aérien des forêts métropolitaines.

Pour répondre aux objectifs de l’Initiative « 4 pour 1000 » et de la Trajectoire 5.0, lancée en 2019 par le ministère en charge des Outre-mer, l’étude « 4 pour 1000 » Outre-mer formule une série de recommandations.

Premièrement, il faut préserver les stocks élevés de carbone du sol et de la biomasse aérienne dans les territoires ultramarins et limiter leur diminution.
  • Recommandation n°1 : intégrer dans la Politique agricole commune la rémunération des services écosystémiques associés aux pratiques agricoles et forestières préservant les stocks des sols.
  • Recommandation n°2 : lutter contre la spéculation et la rétention de foncier agricole.
  • Recommandation n°3 : promouvoir les pratiques agroécologiques grâce à des mesures incitatives et à la communication.
  • Recommandation n°4 : faciliter l’accès aux moyens nécessaires à la mise en œuvre des bonnes pratiques : investissement, coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA) et formations.
  • Recommandation n°5 : transposer le Label bas-carbone pour contribuer à l’adoption de pratiques stockant du carbone par une incitation économique.
Deuxièmement, cinq actions de recherche sont recommandées pour y contribuer :
  1. Accroître la connaissance des stocks de carbone du sol et des bilans de gaz à effet de serre dans les territoires ultramarins pour mesurer les retombées des politiques publiques de lutte contre le changement climatique.
  2. Adapter les méthodes de quantification des capacités de stockage du carbone dans les sols pour transposer le Label bas-carbone aux conditions et cultures tropicales.
  3. Renforcer les travaux sur la dimension sociale – à ce jour peu explorée – pour favoriser les innovations et l’adoption de bonnes pratiques.
  4. Développer des approches co-construites d’évaluation de scénarios agroécologiques à l’échelle de chaque territoire ultramarin.
  5. Créer des espaces de dialogues entre acteurs scientifiques, politiques, agricoles et forestiers, pour mieux intégrer les territoires d’Outre-mer dans les engagements français et européen en matière de lutte contre le changement climatique.

Les résultats de l’étude ont été présentés au Salon international de l’agriculture le 1er mars.

Télécharger l'étude 4pour1000 outre-mer

 

« 4 pour 1000 », les sols pour la sécurité alimentaire et le climat

L’Initiative internationale « 4 pour 1000 » incite les acteurs à s’engager dans une transition vers une agriculture régénératrice, productive, hautement résiliente, fondée sur une gestion adaptée des terres et des sols, créatrice d’emplois et de revenus, et ainsi porteuse de développement durable.

Elle veut montrer que l’agriculture peut apporter des solutions concrètes au défi posé par les dérèglements climatiques tout en relevant celui de la sécurité alimentaire à travers la mise en œuvre de pratiques agricoles adaptées aux conditions locales : agroécologie, agroforesterie, agriculture de conservation, gestion des paysages…

L’Initiative facilite le développement d’actions concrètes sur le terrain, bénéficiant à la fois aux agriculteurs et éleveurs, premiers concernés par la dégradation des terres, et aussi plus largement à l’ensemble de la population mondiale.

 Le site du projet 4pour1000 outre-mer