Pour continuer à manger du chocolat, transformons la culture du cacao !

Science en action 14 avril 2022
Les modèles actuels de culture du cacao ne répondent pas aux besoins de la grande majorité des producteurs. Ils ne sont pas non plus durables au regard du changement climatique. Entre pauvreté, déforestation, maladies, la filière cacao doit se transformer de toute urgence. A l’occasion des fêtes de Pâques, (re)découvrez les travaux du Cirad pour une cacaoculture durable.
Femmes ouvrant des cabosses de cacao (Vietnam) © E. Cros, Cirad
Femmes ouvrant des cabosses de cacao (Vietnam) © E. Cros, Cirad

Femmes ouvrant des cabosses de cacao (Vietnam) © E. Cros, Cirad

La consommation de cacao au niveau mondial ne cesse d’augmenter. En parallèle cependant, la productivité au niveau des exploitations reste basse et fluctuante selon les années. Les hausses de la production proviennent donc principalement de l’augmentation des surfaces cultivées, qui empiètent généralement sur des zones forestières et participent ainsi à la déforestation. « Au Ghana, deuxième producteur mondial de cacao, on estime que plus d’un quart de la déforestation entre 1990 et 2008 est à imputer à la culture du cacao », précisent Martijn ten Hoopen et Stéphane Saj, correspondants de la filière cacao au Cirad.

Au-delà des enjeux de durabilité et de préservation de la biodiversité, la faible productivité des systèmes de culture du cacao entraîne une vulnérabilité socio-économique pour les producteurs, souvent en situation d’extrême pauvreté, notamment en Afrique de l’Ouest.

« Le modèle dominant, en monoculture, est à bout de souffle, souligne Martijn ten Hoopen. Entre le vieillissement des cacaoyères, dont certaines sont abandonnées, la raréfaction des zones forestières disponibles, les maladies qui se transmettent plus vite en monoculture… Sans compter le rétrécissement des zones aptes à la culture du cacao, dans un contexte de changement climatique. Les modèles de culture du cacao doivent se réinventer. »

Les agroforêts : une alternative productive et durable

Le cacaoyer est à l’origine un arbre de sous-bois de la forêt amazonienne, sensible aux écarts de température et qui a besoin d’une humidité constante. C’est la raison pour laquelle cette plante apprécie l’ombrage et l’humidité des sols des agroforêts. Au Cameroun, le Cirad et l’Irad ont démontré que l’agroforesterie constituait une alternative crédible à la monoculture du cacao, à la fois en termes de productivité, de santé des sols et stockage de carbone, et de longévité des cacaoyères. De plus, les arbres associés aux cacaoyers assurent des bénéfices complémentaires aux planteurs, notamment grâce à leurs fruits (avocats, agrumes, mangues, banane, plantain…).

Inventer la cacaoculture de demain

La Côte d’Ivoire et le Ghana représentent 43 % et 20 % de la production mondiale de cacao, respectivement. Dans ces pays, le projet Cocoa4Future évalue la résilience agro-environnementale de 150 cacaoyères conduites en monoculture ou en agroforesterie. D’ici quatre ans, le projet mettra à jour de nouveaux systèmes de cacaoculture, à la fois durables et viables pour les agriculteurs.

La cacaoculture durable : un enjeu aussi pour les pays consommateurs

La France, le vingtième pays consommateur de cacao au monde, s’est engagée pour la transformation du secteur via le lancement, en octobre 2021, d’une initiative française pour un cacao durable, qui s’inscrit dans le cadre de la Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée. L’initiative repose sur trois engagements : améliorer le revenu des producteurs de cacao, mettre fin les approvisionnements français de cacao issus de zones déforestées, et lutter contre le travail forcé et le travail des enfants dans les régions productrices. La feuille de route de l’initiative vient d’être adoptée par ses 26 membres, dont le Cirad, lors de la deuxième réunion plénière de l’initiative le 5 avril 2022. 

La culture du cacao en chiffres

Entre 40 et 50 millions de personnes (dont 5.5 millions de petits producteurs) à travers le monde dépendent de la production de cacao, qui représente actuellement 5 millions de tonnes. 70 % de cette production proviennent de la « ceinture de cacao d’Afrique de l’Ouest », qui s’étend de la Côte d’Ivoire au Cameroun. L’Europe, premier consommateur de cet or noir, rassemble une industrie de transformation dont le chiffre d’affaire annuel atteint les 62 milliards d’euros.