Le développement durable en silos, ça ne fonctionne pas : choisir les approches territoriales

Vient de sortir 11 mars 2024
A six ans de leur échéance, les 17 Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies sont encore loin d’être atteints. En cause notamment : une gouvernance trop sectorielle. Et s’il suffisait de changer de focale ? Depuis une dizaine d’années, le Cirad prône la perspective du territoire. Que ce soit pour la formulation de politiques ou la mise en œuvre de projets, les approches territoriales offrent une méthodologie concrète pour mettre en place une gouvernance multi-niveaux, multi-acteurs et multi-secteurs. Suivez le guide au travers d’un nouveau livre blanc.
Terres agricoles au Vietnam © GIZ / Binh Dang
Terres agricoles au Vietnam © GIZ / Binh Dang

Terres agricoles au Vietnam © GIZ / Binh Dang

Si les activités agricoles visent en premier lieu la sécurité alimentaire des populations, participent-elles aussi à la création d’emploi ou à la conservation de la faune et de la flore locale ? Les activités minières ne freinent-elles pas le développement des activités agricoles dans une région ? 

« Ces questions illustrent l’interdépendance qu’il existe entre les différentes activités menées au sein d’un même territoire, annonce Élodie Valette, géographe au Cirad et co-autrice du nouveau livre blanc du groupe « Pour une perspective territoriale du développement » (TP4D). Les approches territoriales servent à comprendre ces interactions et à établir, via des démarches participatives, des politiques adaptées aux réalités locales. L’objectif est que toutes les activités d’un territoire se développent sans se freiner entre elles, et ce de manière durable et juste ».

Les approches territoriales pensées en lien avec la spécificité des contextes fournissent un cadre solide pour l’analyse et la mise en œuvre d’interventions de développement. Elles articulent une diversité de secteurs et d’acteurs, et activent des processus de transformation économique, écologique et sociale, souvent complexes, dans chaque espace géographique.

De la mise en œuvre des approches territoriales

En 2019, le Cirad et de nombreux partenaires signaient déjà un premier livre blanc pour définir les principes fondateurs des approches territoriales. Parmi les partenaires de TP4D, on retrouve la FAO, l’OCDE, l’UNCDF, le NEPAD, la GIZ, le BMZ, l'AFD et la Commission européenne. Ces organisations partagent la conviction que les approches territoriales devraient être adoptées chaque fois que cela est possible, et qu’elles apportent une valeur ajoutée dans un contexte local donné.

Quatre ans après, le groupe publie un nouveau livre blanc, cette fois sur l’opérationnalisation des approches territoriales. Cet ouvrage clarifie les étapes et principes à suivre pour mettre en œuvre des approches territoriales efficaces.

« On dépasse les concepts et les définitions, abordés dans la première mouture de ce livre blanc, pour lister neuf recommandations qui facilitent la mise en œuvre des approches territoriales, détaille Élodie Valette. On montre par exemple que l’institutionnalisation de l’étape du diagnostic territorial est incontournable ou encore à quel point la prise en compte des dynamiques sociales et des déséquilibres de pouvoir est importante ».

Les politiques nationales, soutien clé

Pour formuler ces recommandations, TP4D s’est basé sur de nombreux retours d’expérience à travers le monde. Les auteurs soulignent que toutes ces expériences ont montré la place centrale des politiques nationales, courroies essentielles dans la mise en œuvre des approches territoriales, notamment au travers des politiques de décentralisation.

Jérémy Bourgoin, géographe au Cirad et co-auteur du livre blanc, explique que « la décentralisation encourage les mouvements « bottom-up », c’est-à-dire émanant des acteurs de terrain. Elle permet une meilleure prise en compte de leurs besoins et facilite les dynamiques d’autonomisation. Les politiques nationales créent des cadres qui viennent renforcer les droits, comme l’accès à la terre ou à l’usage des terres, et soutiennent le nécessaire renforcement des capacités à l’échelle locale ».