Sucre, rhum, engrais, bioénergie… : les productions à base de canne à sucre sont nombreuses. Face à une demande croissante au niveau mondial, la culture s’intensifie, les rendements s’améliorent et de nouvelles surfaces agricoles sont plantées.
Avec un peu moins de trois millions de tonnes produites annuellement, la canne à sucre française reste un poids plume face aux productions brésilienne (715 millions de tonnes en 2021) ou indienne (405 millions). Sur le plan scientifique et agronomique en revanche, la France se démarque nettement par des pratiques agricoles plus vertueuses et respectueuse de l’environnement. Le maître-mot : l’agroécologie, soient des méthodes basées sur la réduction de l’utilisation de produits chimiques, la restauration de la biodiversité et le maintien de la santé des sols.
Une canne durable et agroécologique en outremer
« A La Réunion par exemple, la culture de canne à sucre s’étend sur la moitié de la surface agricole utilisable. Son rôle pour l’économie locale est crucial. » Christophe Poser est correspondant de la filière canne à sucre au Cirad. Il travaille au sein d’une équipe de scientifiques qui collaborent avec des producteurs de canne et des acteurs locaux depuis des dizaines d’années. A La Réunion, en Guadeloupe et en Martinique, la mise au point d’alternatives aux herbicides est la priorité absolue. Sur ces territoires, le Cirad et ses partenaires contribuent au développement d’une ambition « vers zéro pesticide ».
« Le contexte dans les outremers français est favorable à une transition agroécologique, décrypte le chercheur. La culture y est déjà pratiquée de manière assez vertueuse, c’est-à-dire avec un usage raisonné des intrants chimiques et sans recours au brûlage avant la récolte. Des progrès sont réalisés en terme de disponibilité de variétés de canne adaptées, de lutte biologique, mais aussi de systèmes de plantation novateurs. La présence d’insectes auxiliaires des cultures augmentée par l’introduction de plantes hôtes est encouragée. » Si les producteurs sont convaincus de la nécessité de progresser dans cette voie, toutes les solutions ne sont pas encore là. Selon Christophe Poser, un important travail collectif de mise au point des techniques et d’évaluation des impacts est nécessaire. Enfin, « la transition ne sera possible que si les agriculteurs voient un intérêt financier rétribuant leurs efforts ».
Amélioration variétale, meilleures connaissances des bioagresseurs, nouvelles pratiques agricoles incluant le numérique, viabilité économique de ces innovations, organisation de la filière, etc. : la recherche participe à ouvrir le champ des possibles. En outremers, elle peut compter sur le soutien de l’Union européenne, qui met l’accent sur une agriculture plus respectueuse de l’environnement.
Ensemble, le Cirad et eRcane, centre de recherche sur la canne à sucre basé à La Réunion, accompagnent la filière canne à sucre en proposant des solutions pour une canne plus durable et responsable tout en soutenant les planteurs dans leurs problématiques agricoles et la gestion de leurs parcelles avec des outils innovants et modernes. En août 2020, ils ont signé un nouvel accord-cadre de coopération scientifique pour la période 2021-2027.
L’agroécologie pour les petites exploitations africaines
Plusieurs des solutions déjà développées dans les outremers français pourraient être déployées en Afrique, selon Christophe Poser. « Le continent fait face à une augmentation de la demande en sucre, liée à la hausse de sa démographie. Face aux évolutions du marché, mais aussi face aux impacts du changement climatique, l’agroécologie pourrait séduire les petits producteurs. Les sols restent en bonne santé et utilisables longtemps, les revenus se diversifient, la dépendance aux intrants diminue… Les avantages sont certains. »
Les techniques existent, encore faut-il qu’elles soient adoptées. Le Cirad compte donc sur la contribution des sciences humaines et sociales pour identifier les verrous à la transition agroécologique sur ces territoires, en s’appuyant sur un réseau de partenaires locaux, dans le domaine de la recherche, de la formation et de l’agriculture.
La serre de quarantaine de Montpellier, aide au transfert international de variétés
Les pays producteurs de canne s’échangent fréquemment des boutures issues de différentes variétés. Les boutures sont des jeunes pousses coupées. Un hectare de canne à sucre demande dix tonnes de boutures.
Ces échanges permettent aux producteurs de tester, d’adapter et d’améliorer leurs plantations. Or, les pousses sont susceptibles de transporter des maladies, des insectes ou des champignons. Elles doivent donc passer par des serres de quarantaine.
Afin d’assurer une protection à ses partenaires, le Cirad met à disposition sa serre de quarantaine, basée à Montpellier, et qui abrite également plusieurs variétés adaptées au changement climatique. L’objectif est d’améliorer l’accès à la biodiversité, véritable clé d’adaptation pour les producteurs.