Première détection d’anticorps contre le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo chez des animaux en France

Résultats & impact 10 octobre 2025
Une équipe du Cirad vient de publier une étude inédite, menée entre 2008 et 2022 dans le sud de la France, qui révèle pour la première fois la présence d’anticorps contre le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC) chez les animaux d’élevage et sauvages. Des résultats qui suggèrent une circulation probable du virus dans différents départements français du pourtour méditerranéen et des Pyrénées.
Tests sérologiques © C. Dangléant, Cirad
Tests sérologiques © C. Dangléant, Cirad

Célia Bernard, éco-épidemiologiste et autrice de l'étude publiée dans PLOS One, manipule des sérums sanguins d'animaux pour réaliser une recherche d'anticorps contre le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo par test sérologique. © C. Dangléant, Cirad

Depuis 2015, les scientifiques du Cirad, dans le cadre d’une convention avec la Direction générale de l’alimentation (DGAL – Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire) étudient et surveillent la tique Hyalomma marginatum, un des vecteurs avérés du virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC). Ces travaux portent notamment sur son aire de répartition, son historique d’invasion en France, sa dynamique saisonnière, ses hôtes et son portage d’agents infectieux. En 2023, ils montrent, pour la première fois, la circulation du virus de la FHCC dans les Pyrénées-Orientales, avec la détection du virus dans des tiques Hyalomma marginatum (1)

Des animaux porteurs d’anticorps

Dans cette nouvelle étude (2), menée entre 2008 et 2022, plus de 10 000 échantillons sanguins de vaches et d’animaux sauvages ont été analysés dans le sud de la France. Les résultats montrent que 2 % des vaches et 2,25 % des animaux sauvages (comme les cerfs, les chevreuils ou les sangliers) ont développé des anticorps contre ce virus, signe qu’ils ont été probablement en contact avec lui. L’étude souligne également l’influence des facteurs environnementaux et des interactions entre animaux sauvages et domestiques.

Un risque maîtrisé

Les résultats de cette nouvelle étude suggèrent une circulation probable du virus dans certaines zones étudiées, sans toutefois la confirmer.

Ces résultats doivent être pris avec précaution. Seule la détection du virus dans des tiques, comme cela a été le cas en 2023 dans les Pyrénées-Orientales, permet de confirmer la circulation du virus dans les zones où une réponse immunitaire d’animaux a été caractérisée.

Laurence Vial
vétérinaire entomologiste du Cirad, experte de la tique Hyalomma marginatum.

À ce jour, aucun cas humain de FHCC n’a été détecté en France. Les animaux contaminés, qu’ils soient domestiques ou sauvages, ne présentent aucun symptôme. Ils ne sont porteurs du virus que quelques jours et ne constituent pas un réservoir pour le virus. Aucune mesure sanitaire spécifique n’est nécessaire sur le bétail ou la faune sauvage. 

Des travaux de recherche et une surveillance à poursuivre

Les scientifiques appellent à une surveillance renforcée, notamment dans les zones à risque, et à des approches intégrées pour mieux comprendre et atténuer les risques liés à cette maladie émergente. Plusieurs projets de recherche sont en cours dont le projet PEPR Prezode ARCHE qui vise à mieux comprendre les processus de circulation et d’émergence du virus de la FHCC en France.

Références

(1) Bernard Célia, Joly Kukla Charlotte , Rakotoarivony Ignace, Duhayon Maxime, Stachurski Frédéric, Huber Karine, Giupponi Carla, Zortman Iyonna, Holzmuller Philippe, Pollet Thomas, Jeanneau Mélanie, Mercey Alice, Vachiery Nathalie, Lefrançois Thierry, Garros Claire, Michaud Vincent, Comtet Loic, Despois Léa, Pourquier Philippe, Picard Caroline, Journeaux Alexandra, Thomas Damien, Godard Sabine, Moissonnier Elodie, Mely Stéphane, Sega Manon, Pannetier Delphine, Baize Sylvain, Vial Laurence. Detection of Crimean–Congo haemorrhagic fever virus in Hyalomma marginatum ticks, southern France, May 2022 and April 2023. Euro Surveill. 2024;29(6):pii=2400023. https://doi.org/10.2807/1560-7917.ES.2024.29.6.2400023 

(2) Bernard C, Apolloni A, Grosbois V, Peyraud A, Saengram P, Jori F, et al. (2025) First detection of Crimean Congo Hemorrhagic Fever antibodies in cattle and wildlife of southern continental France: Investigation of explanatory factors. PLoS One 20(9): e0331875. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0331875

Des recommandations pour se protéger
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) a émis ses recommandations pour la population générale et les professionnels en contact avec des animaux ainsi que pour les chasseurs. En cas de suspicion de contamination humaine, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a établi un protocole pour les professionnels de santé afin de garantir une prise en charge sécurisée.