Bonne entente de voisinage chez les plantes pour mieux résister aux maladies

Résultats & impact 13 septembre 2023
Des chercheurs d’INRAE, de l’Institut Agro, du Cirad, du CNRS et de la Yunnan Agricultural University (Chine) ont découvert une forme d’immunité sociale chez le blé et le riz. La sensibilité aux maladies chez ces plantes n’est pas seulement conditionnée par des gènes de résistance mais résulte également d’un dialogue avec leurs voisines de la même espèce. Leurs résultats, publiés dans PLOS Biology, montrent que dans certains cas cette coopération peut réduire de près de 90 % la sensibilité de la plante aux maladies, c’est-à-dire autant que leurs propres gènes de résistance. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives pour améliorer la résistance des plantes aux maladies et contribuer à réduire l’usage des pesticides.
Rizières en terrasses à Bali (Indonésie) © A. Rival
Rizières en terrasses à Bali (Indonésie) © A. Rival

Rizières en terrasses à Bali (Indonésie) © A. Rival

Réduire l’usage des pesticides est un enjeu majeur pour l’agriculture. Les mélanges de variétés sont un des outils pour y parvenir. Il y a un regain d’intérêt pour cette pratique et aujourd’hui en France plus de 10 % des surfaces de blé sont cultivées selon cette méthode. Ces mélanges sont connus pour réduire les épidémies en limitant le passage des maladies d’une plante à l’autre. Toutefois le succès de ces mélanges dans le contrôle des maladies est variable. Cela pourrait être dû en partie à des interactions entre plantes de la même espèce jusque-là inconnues.  

Pour comprendre les effets de ces interactions entre variétés, les chercheurs ont étudié en conditions contrôlées plus de 200 paires qui associaient 2 variétés de riz ou 2 variétés de blé. Ils ont infecté manuellement chacune de ces paires par des champignons pathogènes s’attaquant aux feuilles et ont ensuite analysé la sensibilité des plantes à la maladie selon qu’elles poussaient avec une plante identique ou une voisine d’une variété différente.

Les résultats montrent que dans 10 % des paires étudiées, le voisinage d’une plante affecte sa sensibilité à la maladie. Avec l’aide de modèles génétiques, les scientifiques ont pu quantifier cet effet et montrent que certaines associations réduisent de près de 90 % la sensibilité à la maladie de la plante infectée. Cela signifie que la sensibilité aux maladies des deux céréales majeures que sont le riz et le blé n’est pas seulement conditionnée par des gènes de résistances que possède chaque variété, mais également d’un dialogue que chaque plante établit avec ses voisines. Autrement dit, on assiste chez ses deux céréales à une forme de coopération à l’échelle d’une population. Il pourrait s’agir d’une forme de régulation de l’« immunité collective » comme il en existe chez les animaux.

Dans certains cas cette coopération entre plantes réduit autant les niveaux de sensibilité à la maladie que les gènes de la plante elle-même. Il existe donc un très fort potentiel d’amélioration de la résistance au-delà de l’amélioration variétale. 

Référence

Pélissier R., Ballini E., Temple C., Ducasse A., Colombo M., Frouin J., et al. (2023) The genetic identity of neighboring plants of neighboring plants in intraspecific mixtures modulates disease susceptibility of both wheat and rice. PLOS Biology 21 (9) DOI : doi.org/10.1371/journal.pbio.3002287

Étude réalisée dans le cadre du laboratoire international associé franco-chinois Plantomix.