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Experts mondiaux réunis au Vietnam pour la bioprotection et une agriculture durable
Cérémonie d’ouverture de la Conférence internationale sur la bioprotection pour une agriculture durable (ICBPSA25) à l’Université d’Agriculture et de Foresterie de Hué, août 2025 © ICBPSA
En août 2025, l’Université d’Agriculture et de Foresterie, Université de Hué (HUAF), conjointement avec le CIRAD, a accueilli la Conférence internationale sur la bioprotection pour une agriculture durable (ICBPSA25), réunissant plus de 100 chercheurs, praticiens et étudiants. Avec 25 communications scientifiques soumises et la participation d’au moins neuf pays et de plus de dix institutions, l’ICBPSA25 s’est imposée comme un carrefour d’échanges scientifiques sur les pratiques agroécologiques.
Partenariat mondial pour la bioprotection
L’ICBPSA25 a été coorganisée par le CIRAD et l’Université d’Agriculture et de Foresterie, Université de Hué (HUAF), avec la participation des principales institutions vietnamiennes telles que l’Université de Can Tho, l’Université Nong Lam, l’Université des Hauts Plateaux du Centre (Tay Nguyen University), l’Université nationale d’Agriculture du Viet Nam et l’Institut de Protection des Plantes. Le programme a également associé des partenaires internationaux, dont le CABI, l’Université d’Agriculture et de Technologie de Tokyo (Japon), l’Université Andalas (Indonésie) et l’International Weed Science Society.
La conférence a bénéficié du soutien de l’Année France–Vietnam de l’Innovation, de l’Ambassade de France au Viet Nam, ainsi que de sponsors du secteur privé tels que Ca Mau Fertilizer et Bio-Pro. En réunissant les principaux acteurs du monde scientifique, politique et industriel, elle a offert une vision d’ensemble des défis et des solutions qui façonnent l’agriculture durable.
Nous espérons que la conférence apportera une valeur scientifique significative, inspirera de nouvelles recherches et contribuera concrètement à une agriculture verte et durable à l’avenir.
Des méthodes durables sans sacrifier les rendements
La conférence de deux jours s’est articulée autour de quatre thèmes scientifiques montrant comment la bioprotection permet de réduire l’usage des engrais et des pesticides sans sacrifier les rendements ni la qualité, remettant en question l’idée selon laquelle davantage d’intrants seraient toujours nécessaires pour accroître la productivité.
- Développer une protection des cultures respectueuse de l’environnement : les chercheurs ont mis en avant des solutions qui réduisent la dépendance aux pesticides et favorisent des sols et des cultures plus sains.
- Protéger le riz dans un climat en mutation : les recherches sur les produits microbiens et les variétés résistantes ont montré comment la céréale de base en Asie peut être à la fois productive et plus respectueuse du climat, en réduisant l’usage d’engrais et les émissions de gaz à effet de serre tout en résistant aux principales maladies.
- Une gestion plus intelligente des cultures pour des récoltes meilleures et plus sûres : les travaux sur la fertilisation, les seuils d’infestation et le comportement des résidus ont montré comment des stratégies intégrées de santé des plantes peuvent améliorer la productivité tout en réduisant les intrants superflus.
- Passer à l’échelle grâce à l’innovation : des extraits végétaux et polymères naturels à la production de masse d’insectes auxiliaires, de nouvelles solutions biosourcées se rapprochent de l’utilisation à la ferme comme alternatives aux pesticides de synthèse.
Ces sessions ont mis en avant les chercheurs du CIRAD présentant les avancées de leurs travaux dans la région. Dr Pierre Lefeuvre a partagé des percées dans le séquençage à haut débit pour une détection plus rapide des virus des plantes, tandis que Dr Didier Lesueur a montré comment les inoculants microbiens soutiennent les cultures de café et de poivre. Parmi les autres contributions figuraient le Dr Frédéric Labbé sur l’évolution des maladies des agrumes, Dr Phan Thị Ngân sur la gestion des nématodes dans le riz, M Francisco Martinez Martinez sur les interactions écologiques, et Mme Linna Ngang sur la dynamique des ravageurs et des maladies dans les systèmes rizicoles cambodgiens.
Le passage à l’échelle de la bioprotection reste un défi
Les agriculteurs disposent déjà de nombreuses alternatives aux pesticides, allant des ennemis naturels et des phéromones aux variétés résistantes et aux nouveaux outils de diagnostic. Le véritable défi consiste à rendre ces solutions pratiques et accessibles. Leur adoption dépend du bon système d’accompagnement : formation, produits fiables et incitations pour encourager les agriculteurs à s’éloigner d’un usage intensif des pesticides.
La technologie fait partie de la réponse, mais l’accessibilité reste un obstacle. Dr Pierre Lefeuvre, du CIRAD, a montré comment le séquençage à haut débit permet de détecter les virus des plantes avec une rapidité et une précision sans précédent. Pourtant, dans les pays en développement, le coût et les infrastructures en limitent encore l’utilisation
Malgré les difficultés liées au passage à l’échelle, le besoin en gestion intégrée des ravageurs (IPM) devient de plus en plus évident. Dr Harinder Singh, de la Weed Science Society, a souligné la propagation des mauvaises herbes résistantes aux herbicides comme un avertissement : s’appuyer sur une seule méthode de lutte est risqué, et des stratégies de protection des cultures plus diversifiées seront nécessaires. Pour le Viet Nam, Dr Hoang Thi Thai Hoa (HUAF) et Dr Tran Thi Thu Ha (TUAF) ont ajouté que ces stratégies doivent également s’ancrer dans les conditions locales, la formation des agriculteurs et un appui renforcé de la recherche jouant un rôle central pour rendre la bioprotection viable en pratique.
Relier la recherche à la pratique agricole
Les visites de terrain ont mis en évidence à la fois les difficultés et les opportunités de la mise en pratique de la recherche. À Huong An, les producteurs d’oignons ont expliqué les défis liés à l’adoption au niveau local : si certains utilisent des engrais à base de microbiome, les champs voisins continuent de recourir aux intrants conventionnels, ce qui rend les bénéfices difficiles à percevoir clairement.
Les participants ont ensuite visité un site de transformation de rau má (Centella asiatica) dans le cadre du programme OCOP (One Commune, One Product) du Viet Nam, une initiative nationale qui aide les coopératives locales à développer des spécialités régionales. Avec l’appui des universités agricoles et médicales, la coopérative a appris à transformer cette herbe fraîche et périssable en poudre de thé, ajoutant ainsi de la valeur et de nouvelles sources de revenus.
À travers des sessions plénières, des présentations scientifiques et des visites de terrain, le programme intensif de deux jours a montré que la bioprotection progresse sur deux fronts : dans les laboratoires, où de nouveaux outils sont développés, et sur le terrain, où les agriculteurs les testent en conditions réelles. L’ICBPSA25 a créé une plateforme permettant aux scientifiques, décideurs et praticiens d’échanger leurs points de vue, mais le passage de l’innovation à l’adoption dépendra de politiques de soutien et de systèmes renforcés aidant les agriculteurs à mettre en œuvre des pratiques durables.