Biofunctool® : l’outil de terrain, low-tech et low-cost pour évaluer la santé des sols

Résultats & impact 5 février 2024
Un sol sain fonctionne bien. C’est sur ce principe que se base la méthodologie Biofunctool®, en mesurant trois fonctions essentielles des sols. L’outil est simple d’utilisation, peu coûteux et robuste. Il est complété par une application mobile et une plateforme web fraîchement développées et bientôt disponibles pour les acteurs du conseil et de la formation agricole et la communauté scientifique.
La plupart des expérimentations de Biofunctool® se réalise directement au champ © T. Perron, Cirad
La plupart des expérimentations de Biofunctool® se réalise directement au champ © T. Perron, Cirad

La plupart des expérimentations de Biofunctool® se réalise directement au champ © T. Perron, Cirad

En 2018, Alexis Thoumazeau soutenait sa thèse de doctorat avec le Cirad et l’IRD. Son objectif : développer une méthodologie de terrain applicable aux contextes du sud pour évaluer la santé des sols. C’est à partir de là que Biofunctool® est né. « L’originalité de l’approche est de mesurer le fonctionnement des sols lié à son activité biologique, car la notion de santé des sols se base sur sa capacité à fonctionner durablement », précise Alexis Thoumazeau, aujourd’hui chercheur au Cirad.

Cette approche fonctionnelle de la santé des sols est celle retenue par la première proposition de législation européenne sur les sols (Soil Monitoring Law) en juillet 2023. « Pourtant les méthodes les plus utilisées sont encore basées sur des indicateurs de stock (carbone, azote, biomasse microbienne) peu en phase avec cette vision fonctionnaliste et dynamique de la santé des sols » pointe Alain Brauman, co-concepteur de Biofunctool® et écologue du sol à l’IRD.

Scorer la santé de sols pour la transition agroécologique

Les changements de pratiques agricoles ont un impact sur la santé des sols. Dans le cadre de la transition agroécologique, il est donc impératif de caractériser ces impacts sur le fonctionnement d’un sol, donc sur sa santé.

Ainsi, Biofunctool® se compose de neuf tests qui aboutissent à des indicateurs suivant trois fonctions des sols :  

  • 4 indicateurs sur le maintien de la structure du sol
  • 3 indicateurs sur la dynamique du carbone
  • 2 indicateurs sur le cycle de nutriments dans les sols

« Sauf un test que l’on a conçu, les huit autres tests existaient déjà quand j'ai fait ma thèse, explique Alexis Thoumazeau. L’innovation a été de les associer à travers notre cadre conceptuel et de proposer une évaluation multicritère pour en tirer un index de santé du sol ».

Biofunctool® est un outil adapté à la comparaison de pratiques ou au suivi temporel de changements de pratiques dans un contexte donné. Il n’y a pas de valeur de référence absolue. « En réalité, une valeur absolue ou intrinsèque pour la santé des sols n’a pas de sens tant elle est liée à son contexte pédoclimatique », précise Jim Félix-Faure ingénieur d’étude au Cirad.

Un outil de terrain, low tech et low cost

Comme la plupart des expérimentations se font au champ, Biofunctool® permet des discussions avec les agriculteurs autour des résultats obtenus en direct. « Je me souviens d’une visite chez un producteur de céréales en agriculture de conservation des sols, raconte Jim Félix-Faure. Malgré ces pratiques agroécologiques exigeantes, sa parcelle du bas ne donnait pas. Grâce à certains indicateurs Biofunctool®, nous avons rapidement constaté que sur cette zone le sol était bien trop compacté. Ce diagnostic posé, il a pu résoudre rapidement le problème en décompactant le sol ».

Ces échanges pédagogiques sont très appréciés des utilisateurs de Biofunctool®. La méthode suscite un fort intérêt également auprès des chambres d’agriculture, des formations en agriculture et des instituts techniques comme Terres Inovia.

Faciliter les prises de mesure pour une meilleure adoption par les usagers

« Au début on visait un usage direct par les agriculteurs. Mais les tests, bien que peu techniques, sont nombreux nécessitent un savoir-faire, du temps et pas mal de matériel, précise Alexis Thoumazeau. Un test comme celui du Beerkan, qui mesure la vitesse d’infiltration de l’eau est simple à réaliser, mais immobilise une personne pendant près d’une demi-heure. C’est trop long pour un conseiller agricole et a fortiori pour un agriculteur ».

En 2022 et 2023, une petite équipe se concentre sur les développements technologiques et méthodologiques pour améliorer les méthodes d’analyse, les simplifier et les rendre réalisables juste au retour du champ. Les scientifiques ont par exemple conçu un système d’automatisation low-tech du test d’infiltration de l’eau via des technologies open source Arduino et imprimante 3D.

Avec la société E-Tumba, les scientifiques ont également développé une application mobile et une plateforme web qui aident à la prise de mesure sur le terrain et à l’analyse des résultats des différents indicateurs. La première version de l’application mobile est prête. Des phases de test grandeur nature démarrent au printemps pour valider cette première version. Une mise à disposition est prévue courant 2024 auprès de la communauté scientifique et du conseil agricole.

Ces développements ont été réalisés dans le cadre d’un projet MUSE – Montpellier Université Excellence et deux projets Plan France Relance en 2022-2023, en partenariat avec les sociétés Scop Sagne et E-Tumba.