Quand les plantations de palmiers à huile font revenir la biodiversité

Science en action 16 mars 2023
Des palmeraies pour connecter les aires de conservation et créer de nouveaux passages pour la petite faune sauvage. En monoculture, l’idée était irréalisable. En agroforesterie en revanche, les plantations deviennent des zones à la fois productives et bénéfiques pour l’environnement. Deux Etats du Mexique, Tabasco et Campeche, se lancent dans l’aventure. Le pays souhaite réduire sa dépendance aux importations d’huile de palme en augmentant sa production pour la consommation locale. Soutenue à plus de 90 % par des petits exploitants, la culture de palmiers à huile mexicaine est en passe de se réinventer.
Visite de terrain dans une palmeraie lors du lancement du projet OptiPalMex © DR
Visite de terrain dans une palmeraie lors du lancement du projet OptiPalMex © DR

Visite de terrain dans une palmeraie lors du lancement du projet OptiPalMex © DR

S’assurer des impacts positifs à la fois pour l’environnement et les communautés rurales, aussi bien en termes d’emplois que de qualité de vie : c’est le défi que s’est donné le projet OptiPalMex, via l’appui au développement d’une filière durable d’huile de palme au Mexique. La zone d’intervention du projet s’étend sur les Etats de Tabasco et Campeche, deux régions marquées par une déforestation antérieure.

Sur ces paysages agricoles dominés par des jachères et des prairies, OptiPalMex ambitionne de développer des systèmes innovants de cultures du palmier à huile. Plusieurs solutions en agroforesterie ou en association d’espèces seront testées sur un total de 200 hectares, chez différents agriculteurs. 

« Au Mexique, le marché de l’huile de palme est porté par les petites exploitations familiales. On parle d’un maximum de vingt hectares pour 94 % des producteurs. » Laurène Feintrenie est la coordinatrice scientifique d’OptiPalMex. Chercheuse au sein de l’unité Forêts et Sociétés du Cirad, elle espère que le projet fera évoluer les manières de percevoir les palmeraies : « On veut que ces zones soient productives, certes, mais on veut aussi montrer qu’elles peuvent servir d’outils de restauration du paysage. C’est là toute la force de systèmes agroforestiers : permettre de reconnecter une certaine biodiversité sur des territoires dégradés, tout en créant des conditions économiques favorables pour les populations locales. »

Le Mexique importe aujourd’hui 70 % de sa consommation d’huile de palme. OptiPalMex s’inscrit dans une politique nationale de réduction de la déforestation importée, générée par ces importations. L’huile issue du projet servira donc à satisfaire la demande locale.

Agroforesterie et réintroduction d’essences d’arbres endémiques

Plusieurs modèles seront testés selon les caractéristiques des parcelles. Sur les zones propices aux inondations, les palmiers seront associés à des espèces d’arbres locales aux propriétés drainantes. Sur d’autres terrains, les exploitants pourront préférer des espèces « productives » comme le cacaoyer. 

« Selon les besoins des producteurs, on pourra développer soit les services écosystémiques, soit des productions annexes à l’huile de palme, relate Laurène Feintrenie. Certaines espèces, comme le campêche ou « palo de tinte », pourraient très bien faire d’une pierre deux coups. » 

Considéré au Mexique comme une espèce en danger, le campêche est une légumineuse aux propriétés drainantes. Le bois de ce petit arbre est actuellement utilisé pour la fabrication de poteaux à prairies. Des usages plus anciens lui prêtent pourtant des propriétés intéressantes pour la teinture. Une étude de marché est prévue dans le cadre d’OptiPalMex, afin d’enquêter sur une potentielle valeur commerciale.

Les palmeraies, corridors pour la petite faune sauvage

Précédemment à OptiPalMex, un projet de recherche au sud du Mexique avait mis en lumière le rôle des palmeraies dans le déplacement de la faune sauvage. Sur ces zones déforestées, les plantations constituent des corridors ombragés qu’empruntent de nombreux petits mammifères et oiseaux.

Les zones d’intervention du projet OptiPalMex se concentrent ainsi sur les paysages dégradés où la faune ne passe plus. L’objectif à terme est de permettre à la biodiversité de se reconnecter via ces nouvelles palmeraies. 

Lancement de la deuxième phase du projet OptiPalMex

Démarré en 2021, le projet OptiPalMex débute tout juste sa seconde phase. Plus opérationnelle, cette étape du projet est financée par le Trésor public français, sur fond FASEP (Fonds d’étude et d’aide au secteur privé) à hauteur d’environ 500 000 euros. La société PalmElit, porteuse du projet, en coordonne les actions avec le Cirad. OptiPalMex regroupe par ailleurs plusieurs partenaires mexicains, aussi bien dans le domaine de la recherche que dans le domaine agricole.