Les indications géographiques : valoriser les spécificités des territoires pour des systèmes alimentaires plus durables

Plaidoyer 14 septembre 2021
Concilier viabilité économique et préservation du patrimoine naturel et culturel grâce à une approche territoriale des systèmes alimentaires. Telle est la proposition des 158 participants au dialogue indépendant sur les indications géographiques (IG) organisé en mai dernier par le Cirad et la FAO. Cette concertation a rassemblé des scientifiques, experts, professionnels de différentes filières et institutionnels de 51 pays. Elle fournit des propositions pour alimenter le débat lors du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, prévu le 23 septembre 2021.
Cultivée au Vietnam, la cannelle de Văn Yên se distingue par son goût et son odeur un peu piquants et sucrés. Huit communes du district de Văn Yên bénéficient d'une indication géographique, produisant chaque année environ 7000 tonnes d'écorce de grande qualité. © V. Bonneaud, Cirad
Cultivée au Vietnam, la cannelle de Văn Yên se distingue par son goût et son odeur un peu piquants et sucrés. Huit communes du district de Văn Yên bénéficient d'une indication géographique, produisant chaque année environ 7000 tonnes d'écorce de grande qualité. © V. Bonneaud, Cirad

Cultivée au Vietnam, la cannelle de Văn Yên se distingue par son goût et son odeur un peu piquants et sucrés. Huit communes du district de Văn Yên bénéficient d'une indication géographique, produisant chaque année environ 7000 tonnes d'écorce de grande qualité. © V. Bonneaud, Cirad

« Une indication géographique reconnaît, protège et garantit la réputation de produits issus de savoirs et de savoir-faire ancrés dans l’histoire d’une communauté et d’un territoire, précise Claire Bernard-Mongin, chercheuse au Cirad, spécialisée sur les IG. C’est un droit de propriété intellectuel collectif, garanti par l’Etat, qui nécessite une coordination des opérateurs d’un territoire autour des pratiques qui confèrent au produit sa spécificité. Contrairement à un modèle commercial qui standardise les produits et les méthodes de production, les IG peuvent valoriser une qualité plurielle, reflet de la diversité des territoires et des collectifs humains. »

Lors du dialogue indépendant, les discussions ont porté sur le rôle des IG dans :

  • L’accès au marché et à des chaînes de valeur justes et équitables, avec pour objectif d’améliorer les capacités des producteurs locaux ;
  • La gestion de la qualité, la traçabilité et la protection des consommateurs ;
  • La préservation du patrimoine naturel local, de l’environnement et de la biodiversité ;
  • La promotion de l’identité culturelle et l’assurance d’une diversité alimentaire et diététique. 

A l’issue du dialogue, les participants ont reconnu que les caractéristiques des IG en font des instruments permettant d’accroître, dans certaines conditions, la durabilité des systèmes alimentaires. La valorisation économique des produits d’origine est en effet une option intéressante pour préserver les ressources naturelles, la biodiversité, l'identité culturelle et la diversité alimentaire. A condition d’être garantie par un système de contrôle de la qualité fiable, et de répartir équitablement les bénéfices entre les différents acteurs de la chaine de valeur, cette valeur ajoutée encourage également la gouvernance territoriale. Ce cercle vertueux favorise alors des arrangements collectifs locaux pour la résolution de défis globaux, tels que la durabilité des systèmes de production ou l’adaptation au changement climatique.

« Les participants ont également mis l’accent sur le potentiel des réseaux sociaux et autres plateformes d’échanges, qui offrent de nouvelles possibilités d’organisation et coopération, ajoute Claire Bernard-Mongin. Par exemple, raconter l’histoire d’un produit et ses spécificités, mettre en valeur son terroir d’origine et les savoir-faire du collectifs… Les réseaux sociaux rassemblent des communautés autour de modèles de consommation soucieux de l’origine et des conditions de production de l’alimentation. » 

Enfin, dans un monde numérique, l’innovation en matière de traçabilité et de contrôle des produits d’origine est une dimension cruciale pour le développement du commerce de ces produits. Elle incite à la coopération entre les pays pour lutter contre les fraudes et protéger la réputation des IG, notamment avec le développement du commerce alimentaire en ligne, en plein essor depuis le début de la pandémie de la covid-19. 

IG, agroécologie… ces approches territoriales des systèmes alimentaires, portées par la société civile, changent la donne. Encore faut-il qu’elles trouvent leurs « voix » dans le Sommet onusien à venir, pour contribuer à une réponse collective qui soit à la hauteur de l’urgence des changements à mettre en œuvre. 

Qu’est-ce qu’une indication géographique ?

Une indication géographique identifie un produit qui possède une origine géographique spécifique et en tire des qualités ou une réputation particulière. Ces qualités sont le résultat de facteurs naturels et humains. Elles sont fondées sur les connaissances, les pratiques et les savoir-faire communs à un collectif dans un territoire donné. Les règles d’élaboration d’une IG sont inscrites dans un cahier des charges et font l’objet de contrôles, exercés par un organisme indépendant. Une indication géographique protège ainsi la réputation du produit, et permet de valoriser un bien collectif intrinsèquement lié à un territoire.