Valoriser les résultats, avancées et limites de l'agroécologie à Madagascar au sein des politiques publiques

23/09/2024
Le 19 Septembre 2024, différents acteurs de la recherche, du développement et du monde paysan, avec des représentants de l’Etat œuvrant de près ou de loin dans le domaine de l’agriculture se sont réunis pour un atelier sur le thème "avancées et limites de l'agroécologie". L’objectif était de présenter quelques résultats du projet DInaamicc, coordonné par le Cirad sur les régions Vakinankaratra, Itasy et Analamanga et de l’action ProSilience mise en œuvre par la GIZ dans les régions Androy et Boeny, afin de recueillir les éléments d’un plaidoyer concernant l'intégration des principes de l’agroécologie dans les politiques publiques. Les échanges ont mis en avant les avantages agro-environnementaux et socio-économiques de l'agroécologie et les discussions avec les représentant de l'Etat ont permis de développer une perspective pour le développement de cette pratique au niveau national. Ces deux projets s’inscrivent dans le programme DESIRA de l’Union Européenne. Un booklet illustré présentant les résultats des deux projets ainsi que des recommandations permettant de faciliter la transition agroécologique a été distribué durant l’atelier.
Exploitation agricole sur les hautes terres de Madagascar © projet Dinaamicc
Exploitation agricole sur les hautes terres de Madagascar © projet Dinaamicc

Exploitation agricole sur les hautes terres de Madagascar © projet Dinaamicc

Recueillir des éléments de plaidoyer pour intégrer les principes de l’agroécologie dans les politiques publiques

Les politiques publiques à Madagascar, axées vers une transformation agricole sur le modèle de la révolution verte, n'incluent pas explicitement les principes de l'agroécologie. En partant des résultats d’études scientifiques réalisées dans deux projets inscrits dans le programme Development Smart Innovation through Research in Agriculture (DeSIRa) de l’Union Européenne, un atelier a été organisé par la GIZ et le Cirad, sous le parrainage du Ministère de l'agriculture et de l'élevage, afin de recueillir avec une diversité d'acteurs, des éléments de plaidoyer pour le développement de l'agroécologie à Madagascar.

Panel de discussion au cours de l'atelier © M. Rananja, Cirad

Panel de discussion au cours de l'atelier © M. Rananja, Cirad

Le projet Démarches INtégrées et Accompagnement pour une Agriculture familiale à Madagascar Innovante et résiliente aux Changements Climatiques (DInAAMICC), coordonné par le Cirad, vise à étudier, améliorer et promouvoir des pratiques agricoles durables, la résilience des systèmes agricoles et l'utilisation efficace des ressources naturelles via des démarches collaboratives impliquant des partenaires de la recherche, du développement et du monde paysans dans les régions Vakinankaratra, Itasy et Analamanga.
L´Action ProSilience, intégrée dans le projet global Protection et Réhabilitation des Sols pour améliorer la Sécurité Alimentaire (PRoSol) est quant à elle mise en œuvre par la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit GmbH (GIZ) et vise à renforcer la transition agroécologique vers des systèmes agroalimentaires durables en Afrique Sub-Saharienne. Elle est co-financée par l'union européenne et le Ministère Fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ). A Madagascar, ProSilience intervient principalement dans les régions Androy et Boeny.

Après une présentation synthétique des principaux résultats des deux projets, et la distribution d’un booklet (livret) de capitalisation les décrivant plus en détail, l'atelier a été structuré en plusieurs sessions interactives, ayant permis aux participants d'enrichir les conclusions des études et de proposer des actions concrètes pour promouvoir une transition agroalimentaire durable. Les recommandations issues de ces échanges seront capitalisés pour préparer une note politique collective pour soutenir cette transition.

Quelques avantages agro-environnementaux et socio-économique de l'agroécologie

Parmi les résultats issus du projet Dinaamicc et de l'action ProSilience, de multiples avantages agro-environnementaux de l'agroécologie ont été soulignés.

  • Les techniques agroécologiques (TAE) ont un impact sur les rendements, qui généralement deviennent plus stables d’une année à l’autre en dépit des aléas, et qui peuvent augmenter significativement dans certaines situations. 
  • Les pratiques agroécologiques soutiennent également la biodiversité agricole à différents niveaux : dans le sol, à la parcelle et au niveau de l’exploitation agricole, contribuant ainsi à l’amélioration de la fertilité du sol et à la résilience des cultures. 
  • Les études ont par ailleurs démontré que les pratiques agroécologiques d’aménagement sont efficaces pour la protection des sols en pente contre l’érosion. Les pratiques culturales telles que l’association et le sous-couvert végétal sont les mieux adaptées pour réduire l’érosion contrairement aux monocultures qui rendent le sol vulnérable à l’intensité de la pluie. 
  • Face aux menaces du changement climatique, la diversité des productions (cultures et élevage) et des activités des exploitations agricoles réduisent leur vulnérabilité et renforcent leur résilience face aux aléas climatiques. Certaines espèces et pratiques introduites par les projets contribuent fortement à cette capacité d’adaptation comme les variétés de sorgho résistantes aux faibles précipitations, les variétés de riz adaptées aux rizières à mauvaises maîtrise d’eau (RMME), des espèces de légumineuses (pois d’Angole) et des variétés de riz pluvial plus adaptées aux conditions réelles. Au-delà des capacités d’adaptation, certaines pratiques agroécologiques permettant de séquestrer du carbone dans le sol contribuent à l’atténuation du changement climatique.

Des avantages sur la socio-économie des ménages ont également été constatés. Ils concernent particulièrement :

  • L'amélioration des revenus des exploitations les plus agroécologiques malgré les charges élevées en travail liés à l’adoption des nouvelles techniques.
  • L’agroécologie contribue à lutter contre les feux et donc à réduire leurs ravages. Elle génère ainsi davantage de bénéfices aux niveaux environnemental et économique.
  • Le renforcement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle au niveau des très petites exploitations agricoles en lien avec la diversité alimentaire. L'étude est actuellement en cours dans le cadre du projet Dinaamicc.

Présentation des posters lors de l'atelier sur les avancées et limites de l'agroécologie © M. Rananja, Cirad

Selon les études menées, les principales limites au développement de l'agroécologie résident dans les caractéristiques structurelles des très petites exploitations agricoles qui sont majoritaires dans le pays, dans les contraintes de trésorerie des exploitations, qui freinent leurs investissements dans les pratiques agroécologiques, et également dans l'insécurité en milieu rural. Ces conditions de développement de l'agroécologie ont également été exposées dans le booklet distribué.

Avec la présence des représentants de trois ministères concernés par la thématique de l'agroécologie, à savoir le Ministère de l'agriculture et de l'élevage, le Ministère de l'environnement et du développement durable et le Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique, l'atelier a permis de discuter de la promotion de l'agroécologie et de son insertion dans les actions de l'Etat, tout en engageant différents acteurs de la recherche, du développement mais aussi les organisations paysannes. 

Booklet disponible ci-dessous :