Forêts : entre préservation et exploitation

Vient de sortir 12 juillet 2023
Les engagements pour lutter contre la destruction et la dégradation des forêts ne cessent de se multiplier. Malgré l’engouement, la pression sur ces écosystèmes reste forte. Et si l’une des solutions résidait dans la restauration des paysages forestiers ? Peut-on concilier, sur ces territoires, conservation de la biodiversité et production de bois d’œuvre ? Alors que l’Union européenne durcit la réglementation sur la déforestation importée, quel rôle peuvent jouer les certifications sur des produits comme le cacao, le soja ou encore l’huile de palme ?
Forêt de la région de Casamance, au Sénégal © R. Belmin, Cirad
Forêt de la région de Casamance, au Sénégal © R. Belmin, Cirad

Forêt de la région de Casamance, au Sénégal © R. Belmin, Cirad

Penser au-delà des échecs des premiers programmes de restauration des forêts. Améliorer les standards de certification pour aider à la lutter contre la déforestation importée, en France et en Europe. Telles sont les ambitions des deux nouvelles notes de politique du Comité scientifique et technique Forêt (CST Forêt), auxquelles le Cirad a contribué.

Créé en 2019 par l’Agence française de développement, le CST Forêt rassemble l’expertise française dans le secteur du bois et vise à accompagner l’avènement de politiques publiques efficaces et justes. Face à l’urgence de préserver ces trésors de biodiversité, les experts s’accordent sur un point : en matière de forêts tropicales, le sort des populations locales sera clé.

« Assurer de bonnes conditions de vie aux communautés qui vivent de ces forêts, c’est une des garanties de la durabilité des actions initiées au niveau national comme international, insiste Plinio Sist, directeur de l’unité de recherche « Forêts et Sociétés » au Cirad et membre du CST Forêt. L’avenir des forêts tropicales se joue entre préservation et exploitation. On doit apprendre à respecter le rôle des arbres et l’importance des services environnementaux qu’ils fournissent, mais éviter une mise sous cloche de ressources vitales pour toute une population. »

Restaurer : apprendre des échecs passés

La restauration des paysages forestiers est une idée qui séduit de plus en plus la communauté internationale. Ces dernières années, de nombreux programmes de replantation d’arbres ont vu le jour à travers le monde, avec des résultats relativement mitigés. Aujourd’hui, scientifiques et politiques s’accordent sur l’importance de considérer les forêts comme appartenant à un paysage à part entière, en intégrant par exemple les espaces agricoles ou non forestiers dans les programmes de restauration de « paysages forestiers ».

S’intéresser aux territoires et pas simplement aux arbres n’est pas le seul écueil de ces politiques, nous dévoile la note du CST Forêts. Trop « top-down », soit centralisées ou descendantes, les décisions ont souvent été prises sans l’implication des populations locales. Exclusion, marginalisation : les revers sociaux sont considérables, sans compter le manque d’efficacité et de pérennité des projets. Les experts appellent désormais les décideurs à s’assurer de l’inclusion des populations locales dans les processus de décision.

Lire la note du CST Forêt : « L’opérationnalisation de l’approche de la restauration des paysages forestiers en question : décryptage et perspectives »

Des territoires certifiés « zéro déforestation » ?

Ces paysages restaurés pourraient fournir des produits agricoles et forestiers respectueux des standards de durabilité, détaille Plinio Sist. « Le bois d’œuvre par exemple, dont la demande ne fait qu’augmenter, est une des sept filières visées par la lutte contre la déforestation importée de l’Union européenne. On pourrait imaginer des territoires qui lient restauration forestière et exploitation durable du bois, et qui bénéficieraient de certifications sur les marchés. »

Objets de la seconde note du CST Forêt, les certifications existantes ne répondent pas encore aux exigences françaises et européennes en matière de lutte contre la déforestation importée. Soja, bois, huile de palme, cacao : « aucun standard de certification pour les quatre produits retenus n’est aujourd’hui pleinement conforme aux critères de la Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI) » assène la note. 

Flou autour de la définition de « dégradation forestière », manque de traçabilité des produits, critères sociaux mal mis en œuvre sur le terrain, manque d’audits… Autant de pistes d’amélioration sur lesquelles devront se pencher les prochaines politiques pour soutenir ces initiatives. 

Lire la note du CST Forêt « Quel potentiel de la certification dans la lutte contre la déforestation PAR tropicale importée ? »