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14/10/2016 - Communiqué de presse
Publiés dans la revue Science , les travaux d'une équipe internationale regroupant des chercheurs de 90 institutions, dont le Cirad, démontrent que la perte de diversité des forêts de la planète diminue leur productivité. Conséquence : leur capacité à stocker le carbone, et donc à atténuer le changement climatique, se réduit également. En outre, cette étude a permis de chiffrer la valeur économique de cette biodiversité : elle serait comprise entre 166 et 490 milliards de dollars par an.
Les forêts sont les écosystèmes terrestres qui abritent la plus grande biodiversité. Celle-ci est toutefois particulièrement menacée : déforestation et changement climatique, notamment, entraînent chaque année la perte de milliers d’espèces animales et végétales. On estime ainsi aujourd’hui qu’une espèce d’arbre sur deux est en danger. Or, au cours des dernières décennies, les scientifiques ont clairement établi l’existence d’un lien entre le nombre d’espèces d’un écosystème et sa santé : les écosystèmes dont la biodiversité diminue fonctionnent généralement moins bien que ceux où elle est préservée. Pour mieux comprendre cette relation, les écologues tentent de caractériser les relations entre diversité des espèces et productivité des écosystèmes.
Des travaux récents ont mis en évidence une corrélation positive entre biodiversité et productivité, mais ceux-ci concernaient principalement les communautés herbacées ; les recherches sur les forêts, restreintes à l’échelle régionale, s’étaient jusqu’à présent focalisées uniquement sur quelques espèces d’arbres. Leurs conclusions étaient-elles extrapolables à l’ensemble des forêts de la planète ?
Pour répondre à cette question, les chercheurs de 90 institutions ont uni leurs efforts au sein de la Global Forest Biodiversity Initiative (GFBI - voir plus bas). Ils ont analysé les données provenant de près de 780 000 parcelles permanentes répartis dans 44 pays. Au total, cette étude sans précédent a inclus plus de 30 millions d’arbres appartenant à 8 737 espèces, présents dans la plupart des biomes de la planète. Outre l’expertise de ses scientifiques, l’UMR EcoFoG et l’UPR F&S du Cirad ont contribué à la consolidation des résultats pour les forêts tropicales grâce aux jeux de données collectés depuis plus de 30 ans à Paracou (Guyane française) et à M’Baiki (République centrafricaine) avec leur partenaire, l’ICRA (Institut Centrafricain de la Recherche Agronomique).
GFBI - Global Forest Biodiversity Initiative
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Les résultats de ces travaux sont sans appel : quelle que soit la zone géographique, une perte de biodiversité engendre une perte de productivité. En revanche, les conséquences diffèrent selon les forêts considérées car certaines ont une « élasticité de substitution » supérieure aux autres : les espèces disparues y sont remplacées par des espèces équivalentes qui assurent les mêmes fonctions et contribuent ainsi au maintien de la productivité. D’une façon générale, une diminution globale de 10 % des espèces d’arbres causerait un déclin de 2,1 à 3,1 % de la productivité des forêts, tandis qu’une perte extrême de 99 % de la richesse des forêts aboutirait à un déclin de productivité de 62 à 78 %. Autre conséquence, pour le climat cette fois : une perte de diversité moyenne (25 %) se traduit par une diminution de 7,2 % des capacités de stockage du carbone par les forêts, limitant leur rôle dans l’atténuation du changement climatique. Enfin, les chercheurs ont estimé la valeur économique de la biodiversité en regard de son rôle dans le maintien de la productivité des forêts exploitables commercialement : elle représenterait entre 166 et 490 milliards de dollars par an. Soit deux fois plus que le coût total estimé de la conservation des forêts...
Liang J. et al . Positive Biodiversity-Productivity Relationship Predominant in Global Forests. Science, 2016; DOI : 10.1126/science.aaf8957