16/10/2015 - Article
C’est un paradoxe : dans certaines régions d’Afrique, la production de céréales est en théorie suffisante pour nourrir les populations, mais les enfants sont malnutris et souvent, meurent de cette malnutrition. Comment est-ce possible ? Au travers d’une enquête, racontée dans un film, les chercheurs du Cirad montrent que de nombreux indicateurs doivent être pris en compte, avec la production céréalière, pour estimer la sécurité alimentaire et nutritionnelle d’une population.
Le paradoxe des Hauts-Bassins: Produire plus pour produire mieux
Un film d'Alissia Lourme Ruiz et Eric Maugerard
Bien qu’indispensable, la production agricole, ne suffit pas à assurer la sécurité alimentaire. Preuve en est ce paradoxe selon lequel certaines régions d’Afrique, au Mali et au Burkina Faso, présentent à la fois un excédent de production céréalière et une situation d’insécurité alimentaire chronique. Dans ces régions, près de 40 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de retard de croissance.
Comment s’explique ce paradoxe ? Pour répondre à cette question, les chercheurs du Cirad ont mené l’enquête. Ils ont répertorié de nombreux facteurs, ajoutés à la disponibilité en céréales, et jusqu’alors peu pris en compte dans les analyses : le niveau de revenu, la composition des repas des enfants, tout comme tout autre apport de nourriture quotidien, le statut des mères ou encore la diversité des activités de celles-ci. Par exemple, si le mari gère habituellement les récoltes et distribue aux femmes la quantité nécessaire de céréales pour l’alimentation, ces dernières doivent compléter ces apports par des produits maraîchers. Cependant, lors de périodes intenses de travail aux champs, elles n’ont que peu de temps à consacrer à des repas nutritifs et équilibrés pour les enfants.
Les hypothèses de résolution de ce paradoxe, formulées dans ce film, sont en cours de validation scientifique. Les chercheurs y avancent quelques pistes d’amélioration. Ils estiment que, dans ces régions d’Afrique, la promotion du genre peut avoir une influence majeure sur l’alimentation et la nutrition des enfants. L’accès au crédit pour les femmes leur donnerait également davantage d’autonomie financière et budgétaire. Mais c’est surtout une approche intégrée des politiques publiques qui permettrait de décloisonner nutrition et agriculture, éducation et santé et de s’orienter vers une résolution de ce paradoxe.